6. Déculpabiliser et se faire entendre.

Dimanche 26 juin 2022, j’apprends à déculpabiliser.

Hier après-midi, comme je l’évoquais, j’ai voulu aller emprunter des livres pour l’été à la médiathèque. Je me suis donc forcée à m’habiller, en robe ample pour laisser mon ventre peinard, et me suis maquillée un minimum pour effacer mes traits de sorcière mal lunée. Arrivée sur place, j’ai à peine eu le temps d’attraper deux livres consacrés à ma maladie dans le rayonnage médecine qu’une violente crise de douleurs m’a pliée en deux. Je me suis assise dix bonnes minutes sur un fauteuil avant de repartir vers les toilettes puis vers ma voiture, la tête complètement dans le coton. A peine une heure plus tard, celle-ci s’est mise à tourner, mes oreilles à bourdonner et ma vue s’est troublée. La chaleur m’a envahie et j’ai bravement fait un malaise en plein Gifi, m’accrochant à un rayonnage le temps que cela passe.

Depuis cela, je ne suis sortie de mon lit uniquement pour me préparer des bouillottes, des plateaux repas et faire pipi. A voir comment le chat se colle à moi, je crois qu’il est heureux que mon énergie se soit à ce point fait la malle ! Ah si, j’ai réussi à faire quinze minutes de yoga hier soir, entre deux siestes. Mon corps est tellement douloureux et raide de la tête aux pieds que cette mini séance m’a fait l’effet d’une bonne nuit de sommeil, deux heures de balnéo, trente bouffées d’air frais et deux mars glacés à la suite. Détente, satisfaction, endormissement immédiat. Je sens qu’il faudrait que je réitère les étirements aujourd’hui. Je ne fais rien sinon me reposer donc et j’ai également un peu coupé les réseaux sociaux. J’avoue que voir les images de soirées, de vacances, de plage, de rando, alors que je subis un tel épuisement me déprime pas mal. Mon portable est loin et à la place, je prends le temps d’écrire, de lire et d’écouter des podcasts. Et franchement Fanny, pourquoi tu ne fais pas ça plus souvent ??

Bouillotte - Endométriose

J’essaie d’apaiser mon esprit. Concernant la maladie et les douleurs, je déculpabilise de prendre des cachets. J’attends de recevoir mardi l’appareil qui me permettra de faire des séances d’électrostimulation. Je n’en espère pas un miracle, juste un peu d’apaisement serait déjà fort bienvenu. Je me suis renseignée sur la fascia-thérapie dont une amie m’avait parlé et j’ai pris rendez-vous avec une praticienne ici à Pau jeudi soir. Il me semble que comme elle est kiné, une prise en charge des soins via une ordonnance serait envisageable. Et ça, ce serait une super nouvelle pour mon portefeuille. Parce que l’acupuncture c’est génial, j’ai même pris un rendez-vous juste avant mon départ pour Mayotte fin juillet, histoire de partir sereine, mais à force, c’est cher. Et après les électrostimulations et la fascia-thérapie, j’ai également des patchs au CBD à tester. Je les ai gagné via un concours sur Instagram. Cela faisait plusieurs fois que j’entendais parler des bienfaits des huiles ou des patchs au CBD mais je trouvais que c’était encore trop tôt dans mon traitement des douleurs pour me tourner vers cette solution. Et puis le prix des huiles au CBD m’avait également bien calmée… Mais bon, ce petit concours va me permettre de découvrir cela. Il s’agit d’une entreprise française qui fait des produits 100% naturels. Les patchs dureraient vingt-quatre heures, contrairement aux cachets qui ne durent que quatre heures et me forcent à me réveiller la nuit…

Et pour finir, il y a trois jours, j’ai écrit à la secrétaire de la gynécologue pour fixer cette fameuse visio post IRM dont elle avait parlé. Mon mail était peut-être osé, j’ai expliqué que j’avais trouvé le premier rendez-vous très rapide, qu’à ce jour personne ne m’avait encore rien expliqué et que j’avançais relativement seule. La gynéco a peut-être pris le temps de lire le compte rendu du deuxième avis que j’ai envoyé en pièce jointe et de regarder les images du premier IRM. Quoi qu’il en soit, elle « préférerait » me revoir en présentiel et non en visio. Je ne sais pas comment je dois le prendre mais je retourne donc à Pellegrin le mardi 19 juillet.

Quand je repense à mon parcours, quand je découvre l’histoire de certaines filles via leurs profils Instagram ou celui d’Anne Steiger dans son livre « Une araignée dans le ventre, mon combat contre l’endométriose » – livre que j’ai emprunté hier à la médiathèque – il y a quand même une petite Fanny au fond de moi qui se révolte un peu. Je dois le dire, je suis parfois effrayée de voir ce que certains médecins sont capables de produire en termes de bêtise humaine. Le profil « balancetonendo » regroupe un bon nombre d’exemples. Le manque d’humanité de certains praticiens me glace le dos. Mais comme pour beaucoup de choses, je fais toujours un peu l’autruche et ne me lance pas un combat effréné de défense des droits des malades. Je ne promeus pas cette indignation au grand jour comme certaines personnes semblent tout à fait à l’aise pour le faire. Quand j’agis comme ça, quand je ne regarde pas les informations pour ne pas voir toutes les injustices du monde, ou quand je ne m’engage pas dans des mouvements sociaux, je me demande souvent si cela fait de moi quelqu’un de lâche. J’ai parfois l’impression d’être égoïste, de trop me satisfaire de ma propre condition et de ne pas m’occuper de celle des autres. Je m’en veux souvent et me déçois de ne pas avoir ce caractère révolutionnaire. Je ne suis pas la première en tête des manifestations qui crie des slogans et fait voler le drapeau. Et pourtant… Pourtant lorsque cela me touche ou touche mon entourage je réagis. Lorsque cela me paraît nécessaire, je sais me faire entendre. Cela me demande de l’énergie, certes, car j’ai un caractère plutôt diplomate et chercherai toujours à éviter le conflit. Mais lorsqu’il le faut, je sais m’époumoner. Je sais expliquer clairement que non, la situation n’est pas convenable. Et d’ailleurs en général quand je le fais, c’est que c’est mûrement réfléchi ! Je ne suis pas trop tête brûlée. Dans ma situation actuelle, j’ai formulé deux ou trois jours dans ma tête le simple fait d’écrire un mail décrivant de manière très politiquement correcte ma « moyenne » satisfaction au secrétariat de la gynécologue. Et je peux le dire, ceci est déjà une étape dans ma révolution. Je ne m’engage peut-être pas dans des combats internationaux, mais je défends ce qui est à ma portée. Je suis bien déterminée, si ce second rendez-vous est aussi expéditif que le premier, à me trouver un autre gynécologue. Parce que oui, je mérite un accompagnement et un suivi qui me conviennent. Et non, je ne mérite pas, et personne ne le mérite, de subir en plus de la maladie, la négligence ou le manque d’humanité des médecins. Je me répète ceci en boucle, comme un petit mantra me guidant sur le chemin de la maladie : « Tu mérites le meilleur traitement possible ». Et quand je dis traitement, je ne parle pas que de médecine. Je parle bien de considération ou même de compassion. Soyons humains merde ! Concernant ce mail de mini révolution, une personne proche qui m’accompagne depuis le début dans ce combat, a eu la maladresse de me dire que je n’aurais pas dû. Je te demande pardon ? Je n’aurais pas dû indiquer à un médecin que son accompagnement ne me convient pas ? Je n’aurais pas dû avoir assez de considération pour ma propre personne pour tenter d’éviter de subir mes futurs rendez-vous et d’en ressortir encore et toujours en pleurs ? Je te remercie de donner ton avis mais je n’ai actuellement aucune force à investir dans la justification de mes actes. Je suis seule à subir quotidiennement la déchéance progressive de mon corps, alors ne me dites pas comment réagir ni ce que je dois faire. Bon je me suis un peu emportée et bien sûr, cette personne s’est tout de suite excusée de sa maladresse. Il est bien normal que je puisse me faire entendre si cela ne va pas.

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