Bienvenue en Serbie !
Belgrade après quelques heures de route à travers les campagnes roumaines et serbes et un arrêt-visite à Timisoara. La reprise de la route fût plus difficile que je ne pensais. Je me voyais toute belle avec mes batteries rechargées à bloc. C’était sans compter les routes nationales serbes et mon état psychologique.
Il n’y avait pas d’autoroute entre Timisoara et Belgrade. Ce qui en soi n’aura pas été un problème pour la voiture et la conduite. Rouler à 20 km/h derrière une charrette serbe doublant un tracteur tout rouillé et être à deux doigts d’écraser un mec portant des bouteilles de gaz en vélo, quoi de plus banal ?! Quelqu’un a vu Chat Noir Chat Blanc de Kusturica ? Et bien là, on est en plein dedans ! Non je crois que le réel problème aura été pour moi et mon cerveau. Pour la première fois, j’ai traversé des villages (et roumains et serbes, ce n’est pas tellement pareil qu’allemands ou autrichiens,…). Et pour la première fois, j’ai pris le temps de réfléchir. C’est comme si l’autoroute m’empêchait jusqu’à présent de cogiter. Comme si je fonçais tout droit à travers mon projet sans prendre le temps de me questionner. Il fallait bien que ça arrive. On ne part pas dans un voyage en solitaire comme ça sans avoir quelques moments de réflexions personnelles. N’est-ce pas d’ailleurs inconsciemment l’objectif principal d’un tel road trip ?
J’ai donc réfléchi, entre deux tracteurs et quelques chiens errants. Et je me suis posée LA question que me pose toujours dans ce genre de moments : Qu’est-ce que je fous là ? Accompagnée de : Comment suis-je arrivée ici et où vais-je ? Vous ne vous êtes jamais posé ce genre de questions ? Et bien vous devriez essayer. Y répondre réellement et sincèrement n’est pas toujours évident et je vous souhaite bonne chance. Qu’est-ce que je fous là ? Pour ma part c’est assez simple, il fallait que je trouve un moyen de coupler mon désir de voyage à mon besoin d’expérience en urbanisme. Un road trip pour visiter quelques villes européennes me semblait donc pas mal. Pour aller plus loin je dirai que j’ai une peur extrême de l’ennui. Il m’était impossible à la fin de mes études d’attendre plusieurs mois avant de trouver un travail dans ma branche. Impossible de rester là à faire des petits boulots trop longtemps. Impossible de ne pas savoir quand cette situation allait changer. J’ai certainement trop peur de perdre du temps. J’aime quand les choses s’enchaînent, alors je fais tout pour. Je ne tiens pas en place. J’aime me tester et découvrir de quoi je suis capable. J’aime bouger. Bref je savais forcément pourquoi j’étais dans cette voiture en traversant la frontière serbo-roumaine. Où j’allais par contre… C’est une autre question ! A Belgrade, Zagreb, Ljubljana,… Je rentrais à la maison. Mais pour faire quoi ? Trouver du travail. D’accord mais où ?… Je suis à peu près sure de la branche dans laquelle je veux bosser, beaucoup moins de l’endroit où je veux le faire. A partir de là, les questions se sont tout d’un coup enchaînées sans que je puisse suivre le fil de mes pensées. Vais-je trouver un travail qui me plaît ? Vais réussir à m’installer quelque part ? Réussir à ne pas m’ennuyer ? A ne pas avoir envie de bouger tous les six mois ? J’en suis arrivée à la conclusion qu’encore une fois, la multitude de possibilités qui s’offraient à moi m’effrayait. Et que donc, cela risquait d’être un peu dur de rentrer et d’attendre la prochaine étape. Qui sera normalement composée d’un boulot et d’un appart. Ouais ça fait rêver !
Il y a quelques heures, je me suis dit que j’avais encore envie de voyager. Je n’ai même pas fini mon voyage actuel que je pense déjà au prochain. Être en Serbie me donne envie de visiter tous les Balkans. L’ancienne Yougoslavie. Je projette déjà mon futur road trip, preuve que je ne suis pour l’instant pas prête à rejoindre les Landes. C’est peut-être pour ça que je panique d’un coup. J’entame le chemin retour alors que je n’ai pas encore trouvé ce que je cherchais dans ce voyage. Au niveau professionnel, je pense que c’est bon. L’aménagement et l’usage des espaces, j’adore ! Au niveau personnel par contre,… Je crois que je ne suis pas allée au bout de mes réflexions. Alors finalement, me dire que j’entame le chemin retour est une erreur. Disons plutôt que je continue ma route. En un mois les choses auront bien le temps de changer. Arrêtons de paniquer !
Il y a certains moments où ma raison essaie de me persuader que le voyage n’est pas qu’un moyen de fuir, que c’est un moyen de s’enrichir et d’avancer dont je ne pourrais jamais me passer. Je suis heureuse quand je voyage toute seule. Je sais que j’aime ça. Mais c’est parfois psychologiquement tellement dur que je me demande pourquoi j’en arrive là. Pourquoi je fais ça ? Aller me perdre au fond de la Serbie en voiture. Qu’est-ce que je fous là et pourquoi je n’arrive pas à être simplement et bêtement heureuse en France. Avec un boulot, un mec, un appart et un chien pourquoi pas. Tout le monde fait ça alors pourquoi pas moi. Mais tout le monde est-il heureux comme cela ? Et moi pourquoi suis-je autant curieuse ? Sur moi et sur les autres. Je cherche sans cesse à me tester et à apprendre en voyageant. C’en est presque épuisant. Ma curiosité m’épuise, c’est un comble. Je voudrais parfois que mon cerveau ralentisse et accepte l’ennui. Qu’il accepte de regarder la télé bêtement pendant des heures ou de répéter et faire sans cesse les mêmes choses. Mais je crois que ça n’arrivera jamais. Je suis donc condamnée à faire des projets, bouger, me poser des questions, les écrire, rencontrer des gens, réfléchir, apprendre, m’épuiser, me tester et recommencer. Et il faut donc que je l’accepte pour en être heureuse. Bon j’y travaille actuellement, c’est bien pour ça que je suis ici à Belgrade. Et je pense qu’un jour je devrais bien y arriver… A chacun sa façon de vivre, il suffit que je trouve celle qui me convient et que je l’apprivoise.
Et en attendant, je continue ma route. Belgrade donc. Après la petite ville d’Arad et un arrêt à Timisoara. Ah la Roumanie ! De grands immeubles hyper denses et hyper moches ; des centres commerciaux ; de vieilles bâtisses en ruines ; des parcs plutôt agréables, bien aménagés et occupés ; des installations électriques franchement pas rassurantes ; des flics corrompus bien sûr et des manifs anti-corruption ; des pigeons et des chiens errants ; des roumains toujours en retard ; des amendes pour non-paiement de parking mais certainement pas pour stationnement sur passages piétons ; des marchés regorgeant de vieilles mamies,… Il y a clairement quelque chose d’africain dans ce pays !
Bon Timisoara est quand même candidate pour être capitale européenne de la culture en 2021. Et pourquoi pas ! D’immenses travaux ont été entamés et sincèrement, quand ils retapent les vieilles bâtisses du centre, c’est assez époustouflant ! Je vous laisse apprécier et file visiter la capitale serbe. Je pense que ça m’a fait du bien de réfléchir et d’écrire un petit peu. C’est bien comme ça qu’on avance non ? Allez encore un mois, ça va le faire ! Bonne journée à vous,
Fanny